Pour la rentrée, la maîtresse nous a réservé une surprise.
Elle a écrit au tableau, en lettres capitales : « L’ECOLE NE SERT A RIEN »
Incroyable non ?
Elle a demandé à un élève de lire cette phrase, ce qu’il a fait sans difficultés, et a semblé satisfaite du résultat.
Devant notre étonnement, elle a continué en écrivant cette addition au tableau
2+5+9 = 14
On a presque tous levé le doigt pour lui dire qu’elle s’était trompée et que 2+5+9 ça faisait 16. Elle a corrigé et semblait toujours aussi contente.
On était de plus en plus surpris.
Alors elle a déclaré que tout le monde dans cette classe avait l’air de savoir lire écrire et compter et que donc, si l’école servait seulement à apprendre à lire, écrire et compter, elle se demandait bien ce qu’on allait faire toute l’année.
Alors, on a réfléchi bien vite à ce problème et on a trouvé que l’école ça servait aussi à s’étonner, à assouvir et développer sa curiosité, à comprendre le monde, à être ensemble, à se tromper pour apprendre de ses erreurs et ne plus les refaire, et bien sûr à apprendre à lire, écrire, compter pour devenir expert dans ces domaines.
Si on ne va pas à l’école, notre cerveau s’étiole c’est pour ça qu’elle est obligatoire.
Pendant cette période nous étudions le roman de François Braud : l’Ecole ça sert à rien. »
La maîtresse nous a avoué que c’est là dedans qu’elle avait pris son idée originale pour la rentrée.
Ce roman nous intéresse beaucoup, il nous fait réfléchir.
Le héros, Vincent, qui est en CM1, rencontre un enfant du même âge que lui, qui n’a pas de prénom. On l’appelle le « P’tit ». Il vit chez ses grands parents et ne sait ni lire ni écrire car il ne va pas à l’école.
Cela nous semble impossible car lors de notre naissance on nous a déclaré à la mairie, nos parents nous ont donné un prénom.
Ainsi nous avons reçu une identité, unique et une existence légale.
Cette situation très étrange du « Ptit » doit cacher un terrible secret, nous avons hâte de le découvrir.
On a fait quelques hypothèses qu’on a écrit et qu’on comparera avec l’explication du romancier.
Peut être que ses grands-parents préfèrent le garder avec eux parce qu’il est malade, ou alors parce qu’ils pensent que c’est plus utile pour lui de travailler avec eux à la ferme ?
Mais, s’il ne va pas à l’école comment pourra-t-il choisir un métier qui l’intéresse ?
S’il ne sait ni lire, ni écrire sa vie quotidienne – remplir les papiers, faire les courses, conduire… – sera très compliquée.
On a hâte de savoir comment tout cela se terminera.
Toute ces réflexions sur notre identité unique nous ont donné envie de travailler en Arts Visuels sur l’autoportrait.
La maîtresse nous a proposé de réaliser notre autoportrait dans un cadre représentant un écran de téléphone portable.
Elle nous a dit que « selfie » en Français se disait maintenant, « egoportrait », du latin « ego » qui veut dire moi-même.
On a trouvé cette activité amusante, surtout que dans une bulle on devait écrire pourquoi on pensait être des bons écoliers.
Voici donc nos « egoportraits »